Dix jours se sont écoulés depuis la « panne » de la cafetière expresso, abandonnée à son sort, délaissée par un modèle bien plus rustique, au café moins goûtu, mais qui fonctionne.
La nouvelle procédure s’est instituée d’elle-même. L’équipe s’est adaptée.
L’unique personne en charge officiellement de ce type de sujet – l’un des membres de l’équipe chargé d’assurer le bon fonctionnement des équipements et le renouvellement des consommables – a annoncé le soir de l’incident la conclusion de son rapport d’enquête : La cafetière est en panne ! Cela ne peut provenir d’un détartrage ! Il faut soit la démonter soit la remplacer.
L’existence d’une solution de remplacement acceptable et l’importance de ne pas perdre son temps à des choses futiles – non productives – et le risque de se voir reprocher ou moquer le fait de chercher à résoudre un problème clos justifient que l’équipe soit passée à d’autres sujets.
Néanmoins, peut-être un peu gênée de savoir que le stock de capsules – au format dédié à cette cafetière expresso – est abandonné, ou peut-être en manque de café digne de cette appellation, ou encore parce que c’est elle qui est chargée de fait – ah que les habitudes se prennent vite ! – d’aller acheter du café et des filtres à la boutique du coin et qu’elle a compris que personne ne se proposera pour prendre le tour, une personne s’est décidée à agir au bout de dix jours. Bien que cela ne soit pas dans ses attributions, elle a appelé le fournisseur de capsules expresso pour lui demander s’ils peuvent réparer ou changer la cafetière ou échanger le stock de capsules.
Et la spirale positive s’est mise à fonctionner.
La télévendeuse, plutôt que d’insister sur la nécessité de faire venir un dépanneur spécialisé ou d’essayer de vendre une nouvelle machine, a fait valoir son expertise technique du domaine et a suggéré de gratter la buse – le petit trou qui est au-dessus des tasses, par lequel le café s’écoulait d’ordinaire – avec un attache trombone. Encouragé et motivé par cette expertise, notre collaborateur a franchi les trois mètres et a débouché la buse – obstruée par un mélange de café et de tartre – en quelques secondes.
La véracité de cette anecdote est entière : il a fallu 10 jours à 10 cadres pour déboucher un porte capsule à café.
Il est intéressant d’observer que c’est la première et aussi la dernière victime – la première personne privée de son expresso et aussi celle qui avait été désignée pour acheter du café – qui a fait le pas pour résoudre le problème.
Il est également très intéressant d’observer que le poids d’une suggestion toute simple est perçu différemment selon qu’il vienne d’un expert du domaine identifié comme tel ou d’une personne non coutumière du sujet. La solution avait en effet été évoquée dès le premier jour mais personne n’avait osé l’essayer. Trop dangereux ? Trop audacieux ? Trop difficile à mettre en œuvre ? Trop long ? Ou absence de consentement collectif ?
Il est enfin toujours intéressant de relever le rôle qu’ont joué les managers, c’est à dire leur absence totale d’implication, au figuré comme au propre pour un sujet si peu digne d’intérêt qu’une cafetière.
Management à la con . com
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